Putain de moine !
Avec toutes mes excuses pour la vulgarité du titre, je trouve qu’il convient bien au sujet.
Avec toutes mes excuses pour la vulgarité du titre, je trouve qu’il convient bien au sujet.
Quand j’ai commencé à faire visiter Sarlat aux touristes, j’imitais beaucoup mes collègues guides, deux jeunes femmes bien plus expérimentées que moi, et j’écoutais tout ce que des Sarladais bien intentionnés et amoureux de leur ville venaient me confier au creux de l’oreille. Plusieurs personnes, des esprits forts comme on disait avant, voulurent me démontrer qu’une tradition libertaire et libertine existait ici depuis très longtemps. La preuve était cette sculpture de moine sur la façade de l’hôtel Plamon :
Tu imagines, me disaient-ils, juste à côté de l’église paroissiale, oser sculpter sur la façade de l’immeuble bourgeois d’une des plus grandes familles sarladaises, un moine en train de se masturber !… Quel culot ! Quelle audace !
Un moine en train de se masturber…
Mouais. En fait, au cours de leur histoire les Sarladais n’ont pas toujours montré un esprit d’avant-garde. Je pense aux XIIe et XIIIe siècles où la ville ne connût pratiquement pas de cathares pourtant bien présents sur la vallée de la Dordogne toute proche. Je pense à l’accueil chaleureux de saint Bernard, représentant de l'ordre et de l'orthodoxie. Je pense aussi aux périodes des « troubles civils » du XVIe siècle, ce qu’on appelle aujourd’hui les guerres de religion, où les Sarladais se tinrent nettement du côté du pouvoir central. Je pense enfin au XVIIIe siècle où le premier maire révolutionnaire de la ville fut… l’évêque et où, à part l’abbé Pierre Pontard dont je reparlerai un jour, la ville ne se fit pas spécialement remarquer par sa vigueur révolutionnaire (ce qui est plutôt un bon point dans la mesure où cette vigueur était alors assez sanglante)… Pour être franc, cette histoire de moine me tracassait.
Vu de profil, en clignant des yeux, on pourrait y croire… quoique… |
Un jour, remarquant toute proche l’échelle du technicien qui entretenait le bec de gaz voisin, j’en profitai pour monter mettre le nez sur l’objet délictueux. Bien m’en pris puisque je découvris que cette belle légende était fausse. Voyez la photo : 1/ Ce n’est pas forcément un moine, l’homme portant le vêtement de l’époque et 2/ Il tient entre sa main qui le masse son pied droit endolori. Je dirais que c’est un pélerin fatigué d’avoir trop marché… exit le libertinage.
Comme ça, de face, aucun doute. Il tient son pied mais ne le prend pas ! |
Curieusement, ces sculptures coquines se rencontrent plutôt sur les églises romanes qui, dans la région, datent pour la plupart, du XIIe siècle, alors que l'hôtel Plamon date du XIVe siècle. On en découvre un certain nombre sur les voussures du portail roman de la cathédrale de Cahors, par exemple (transporté sur le côté nord du bâtiment). Même de petites églises comme à Carsac, ou Cénac, pour rester près de Sarlat, nous donnent quelques exemples de postures peu orthodoxes, charmantes dans la naïveté de leur exécution.
Euh… je me relis… et je précise : exécution de la sculpture, bien sûr, pas des postures !
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